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vendredi
janv.062006

Le Chef de Projet urbain en Europe - Qu'est-ce-que c'est? 6.1.06 [FR]

"Qu'est-ce-qu'il y a de si particulier à cette profession de chef de projet urbain?" - Bien de personnes proches me le demandent. Ils me voient voyager d'une ville à l'autre, participer aux conférences et aux groupes de travail. Comme un commis voyageur, plutôt qu'un adviseur expert des problèmes urbains. "Et pourquoi est-ce tout le temps "européen"? Ne ferais-tu pas mieux de rester un peu dans les parages que tu connais un peu?"

Un début de réponse se trouve dans le texte suivant, extrait d'un mail que je viens d'envoyer à une collègue portugaise. Sociologue, elle avait abandonné une poste administrative dans le service social de sa région natale, pour se lancer sur un terrain inconnu: les faubourgs en dérive de la vieille ville industrielle de Sétubál.

Voici ma "profession de foi professionnelle":

Le monde des gérants de projets urbains est rempli de gens comme toi et moi. Des hommes et des femmes qui souvent ont sacrifié une carrière administrative ou scientifique, ou, de toute façon, une vie tranquille, afinde poursuivre les objectifs qu'ils s'étaient proposés dans leur jeunesse.
Des objectifs concrets de société, de communauté, enfin, de "solidarité"aussi. Mais celle-ci sort déjà de l'ensemble de nos motifs: Les donateurs des charités sont "solidaires" aussi, n'est-ce pas?

C'est pourquoi je l'aime, cette communauté trop virtuelle des chefs de projet urbains. C'est une profession qui ne s'apprend pas aux écoles. Pourtant, il en existe une méthodologie, j'en suis certain, mais elle n'a pas encore été révélée aux universités.

On est terriblement seuls aussi, dans notre travail. C'est en partie une choix: nous sommes des individualistes qui ont horreur des inspections bureaucratiques. Mais le côté négatif de cette isolation-là se révèle, quand nous nous rencontrons sur le plan européen. Alors, tout d'un coup, la découverte de l'existence de collègues, de frères et soeurs (enfin: disons "cousins") qui ont une histoire parallèle à la nôtre, qui se battent avec les mêmes problèmes et qui y trouvent souvent les mêmes solutions que nous - ou des meilleures.

Paradoxalement, la distance géographique nous rapproche alors. J'explique cela ainsi: La distance géographique nous permet de laisser tomber nos carapaces habituelles contre la méfiance des habitants des quartiers, contre les autorités administratives de tutelle et, peut-être aussi, nos boucliers à l'encontre des individualistes du quartier voisin ou de la ville voisine.
C'est d'une richesse énorme et les rencontres de travail de cette sorte-là m'inspirent toujours à découvrir des choses nouvelles ou à créer une nouvelle ligne de pensée qui pourrait enrichir la "méthodologie" future de l'émancipation urbaine.

C'est ce que je viens d'écrire à ma correspondante au Portugal. Il y aurait plein d'autres observations à faire:

  • la non-compréhension de l'approche holistique (politiques intégrées qui partent de l'individu et du groupe et qui ne connaissent aucun tabou sur le plan des secteurs de l'administration à attaquer);
  • les charges administratifs lourds des chefs-de-projet, qui sont chaque fois obligés de "traduire" leurs rapports d'activités vers les cadres administratifs, périmés depuis, qui ont été définis à l'origine du projet;
  • la comparaison des trajets de perfection professionnelle des chefs de projet locaux avec les "chemins d'apprentissage" des apprentis artisans des temps pré-industriels, qui parcouraient l'Europe entière afin de pouvoir apprendre leur métier, loin de leur ville, loin de leurs parents, et de commettre les fautes du débutant dans une ambiance neutre, image dû au seul spécialiste scientifique engagé dans ce monde: Claude Jacquier du CNRS, Grenoble;
  • la "seven-years-itch" qui fait que, trop souvent, après un maximum de sept années, les autorités coupent radicalement court aux projets en route, en détruisant la difficile confiance gagnée auprès des habitants, ainsi que les savoir-faire des chefs de projet locaux;
  • etc., etc...
Nous y reviendrons.

 

jeudi
déc.292005

Clichy-sous-Bois: Devoirs de mémoires 29.12.05 [FR]

Faire jouer les mémoires - c'est un outil très puissant pour la mise en route de l'émancipation collective dans les quartiers urbains marginalisés.
Le 20 décembre 2005, le Collectif "Devoirs de Mémoires" à Clichy-sous-Bois, la commune qui a été à l'origine des émeutes des banlieues de novembre 2005, s'est réuni avec leurs animateurs Jean-Pierre Bacri et Djamel Debbouze, en présence de Joey Starr et du footballeur (Turin) Lilian Thuram. Plus de 400 jeunes, issus de l'immigration, se sont engagés à s'inscrire sur les listes électorales, afin d'utiliser leurs droits en tant que citoyens français.
(Le Monde du 20/12/2005)


Huit jours après, (Le Monde du 28/12/05) la maison communale de Clichy-sous-Bois a été envahie par de centaines de jeunes qui sont venus s'inscrire aux listes électorales. L'ambiance y était moins survoltée qu'il y a une semaine:

Ce n'est pas l'appel des stars françaises du foot, du cinéma ou du rap, parrainé par le footballeur Lilian Thuram ou l'acteur Jamel Debbouze, qui a motivé ces jeunes issus des "quartiers" de Nanterre à se déplacer jusqu'à la mairie. C'est simplement la crise des banlieues, la "rage" qui s'est exprimée à ce moment-là et les mots qui ont été prononcés par certains hommes politiques. Zina, 21 ans, résume leurs certitudes : pour l'élection présidentielle, "en 2007, c'est ni Le Pen ni Sarko." "Je ne vais pas laisser ma voix à quelqu'un d'autre", affirme Malik. "On est français avant tout", renchérit Tida.
S'affirmer comme citoyen français (et européen) est une chose: c'est un acte symbolique. Intégrer ses mémoires du pays natal, de l'immigration, de l'intégration, c'en est une autre. Le travail du mémoire est dur. S'écouter, évaluer les chemins parcourus, apprécier les savoirs des générations précédentes et se faire apprécier par les parents en rendant compte des progrès d'intégration réalisés, c'est un travail d'assez longue haleine. Mais il est très efficace!
Nous en avons vu les résultats à Châtenay-Malabry, également dans la région parisienne, où, pendant plus de dix ans, une équipe de théâtre a travaillé jour après jour avec les habitants, venus de l'Europe du Sud, de la campagne française, de l'Europe de l'Est et les anciennes colonies.
Un trésor d'interviews y a été accumulé. Les expériences personnelles ont été transformées en pièces de théâtre, en expositions, en efforts communs afin d'améliorer la qualité de vie dans les cités de la commune.
Le rôle du groupe de théâtre a été essentiel: c'étaient des gens qui vivaient avec les populations, qui étaient présents en permanence. Ce qui a permis de faire disparaître la méfiance (si compréhensible) des habitants.

D'autres exemples, de Londres, des oral history groups des quartiers de Brème, des forts d'Amsterdam, témoignent également de l'efficacité d'une approche-"mémoire" dans les quartiers urbains marginalisés.

À Clichy-sous-Bois, la méfiance règne encore en maîtresse: Après le "Kärcher" et la "racaille" de Sarkozy, qui s'attendrait à autre chose? Les immigrés "célèbres" ont été pris à parti: "Où étiez-vous avant novembre?"

Tout dépend maintenant de deux conditions:

La première, la plus facile, mais néanmoins pas évidente, c'est que le Collectif sera aidé, sountenu, sous forme permanente, par des professionnels indépendants, "embedded" dans la communauté. Comment assurer la durabilité? Comment les aider à s'orienter vers des actions de mémoire émancipatrices? Comment éviter que, après une ou deux années de "calme", d'autres priorités d'ordre bureaucratique viendront terminer une telle action, en renforçant la méfiance des habitants, au lieu de l'adoucir?

La deuxième condition, moins facile, est relevée avec acrimonie par une des jeunes qui attendaient le 27 décembre devant l'hôtel communal à Clichy, quand ils parlent des partis politiques qui devraient profiter de influx des jeunes votants anti-Le Pen et anti-Sarkozy:

Zina [...] : "A gauche, on attend toujours de savoir ce qu'ils proposent pour nous." Noria pense la même chose : "Je ne les ai pas entendus pendant les violences dans les banlieues. J'attends de voir."
En effet: Si l'engagement citoyen des jeunes des quartiers n'ouvrira aucune perspective dans le monde politique, si la gauche s'entredéchirera encore longtemps autour de son nombril, il y aura d'autres forces politiques qui se rendront maître de leur rage et de leur énergie.

Il est très urgent que, non pas seulement en France, mais aussi en Allemagne, aux Pays-Bas, en Espagne, en Italie, l'Europe profitera enfin du savoir-faire de ses animateurs de quartier. Je parle des gens qui, à partir des années '80, se sont engagés à fond dans ses communautés à la dérive, en accompagnant des rénovations l'habitat, en créant des cours de langue, des boulots-apprentissage, etc. Cela s'appelle "l'approche intégrale" territoriale.

La "porte" à travers laquelle une telle approche s'introduit dans la communauté, est chaque fois une différente. L'action se construit par exemple autour de l'arrivée des policiers de quartier (introduit en France, mais abandonné par Sarkozy après deux ans: les gens se sentent abandonnés, trahis, donc: méfiance!), mais aussi bien autour de la rénovation de l'habitat, ou bien, comme ici, par l'activation, l'intégration des mémoires des groupoes culturels, des générations, des sexes.

Nous en parlerons encore souvent, ici.

(Cliché: Le Monde du 28/12/2005: Nourdine Oumeddour/Le Monde.fr Devant la mairie de Clichy-sous-Bois, le 21 décembre 2005.)
mardi
déc.132005

Regenera The Hague Dec. 2005 Pictures (3)

3rd and last set of pictures of some participants in the Dec. 2005 Regenera Workshop in The Hague.

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mardi
déc.132005

Regenera The Hague Dec 2005 Pictures (2) (13/12/05)









Ivan Tosics from Budapest, not a dancer, with, in the background, Rémy Nouveau, principal expert